Projet de mosquée dans St-Sauveur: «Beaucoup de préjugés»
Annie Mathieu Le Soleil
(Québec) Si le projet de mosquée dans le quartier Saint-Sauveur a suscité de vives réactions chez les résidants du secteur, c’est qu’ils sont très mal renseignés au sujet de l’islam. C’est du moins ce qu’estime le porte-parole de la Mosquée de la Capitale, Mohamed Hafid, qui admet avoir beaucoup de pain sur la planche pour «éduquer» les gens de Québec sur sa religion.
«En général, les gens sont très ignorants de la religion musulmane. Ils ont beaucoup de préjugés», lance celui qui représente l’organisme derrière le projet du lieu de culte de la rue Marie-de-l’Incarnation. La future mosquée, qui prendrait la place d’un ancien salon funéraire, serait située en face de l’église Saint-Malo. Un emplacement qui a soulevé l’indignation de plusieurs participants à la consultation publique de mardi soir qui portait sur le sujet. Les commentaires n’ont cependant pas alarmé M. Hafid, qui a assisté à la rencontre. Selon lui, plusieurs de ceux qui ont formulé des craintes étaient des personnes âgées, des gens qui n’ont pas souvent eu la chance de côtoyer des étrangers. «C’est un changement qui va prendre du temps», affirme le porte-parole. Mais selon lui, les Québécois doivent aussi faire leur bout de chemin. «Le travail de communication et d’éducation doit se faire des deux côtés pour favoriser la coexistence, soutient M. Hafid. On a déjà invité les gens à venir nous voir. Les portes sont ouvertes.» Pas de compétition Le professionnel en technologie de l’information a également l’intention d’aller cogner à la porte du curé Alain Fiset, voisin de la future mosquée. Cette proximité entre les deux bâtiments religieux n’a d’ailleurs jamais gêné M. Hafid, d’origine marocaine. Il a plutôt été étonné de savoir que pour certains, cela posait un problème. «Au Maroc, il y a beaucoup d’églises à côté de mosquées! On n’a jamais fait attention à cela, explique-t-il. On ne veut pas faire compétition à l’église!» ajoute celui qui habite la ville de Québec depuis maintenant 12 ans. Il croit que le besoin d’un nouveau lieu de prière pour les musulmans de la ville est devenu criant au fil des années. «Cela fait plus de deux ans que l’on se cherche un lieu», affirme le père de deux enfants. Présentement, les musulmans de Québec peuvent se rendre à la mosquée située sur le chemin Sainte-Foy ou encore, dans l’une des salles aménagées à cet effet aux quatre coins de la ville. «À la prière du vendredi, les gens se bousculent», témoigne M. Hafid. La communauté musulmane de Québec compterait entre 5000 et 7000 membres et la majorité d’entre eux sont pratiquants, estime Mohamed Hafid. Il est donc normal, selon lui, de leur offrir des services comme celui d’une mosquée. «C’est certain que si on veut avoir des immigrants, il faut avoir des lieux pour qu’ils puissent pratiquer leur religion», lance-t-il. Ce sont des membres de la communauté qui ont amassé les fonds nécessaires pour l’achat d’un lieu permettant d’aménager une mosquée, soit la somme d’un million de dollars. Si le conseil d’arrondissement de La Cité-Limoilou donne son aval au projet et qu’aucun processus référendaire ne le bloque, le tout nouveau lieu de culte pourrait voir le jour dans un délai de six mois, évalue Mohamed Hafid.